Exercices pour reconnaître les rôles dans les jeux de pouvoir.
Cet article présente le triangle de Karpman et propose une série d’exemples afin de s’exercer à reconnaître les différents rôles joués.
Voici le plan de cet article :
1 – Les caractéristiques détaillées des 3 rôles du triangle de Karpman.
2 – Un exercice pour s’entraîner à voir les différent rôles.
3 – Explication de la dynamique du triangle dramatique
4 – Observer son propre comportement / ses réactions
5 – 4 Clés pour sortir / ne pas entrer dans le triangle dramatique
6 – Mémo pour résoudre le triangle de Karpman
1 – Les 3 rôles du triangle de Karpman
Le triangle de Karpman, aussi appelé triangle dramatique est une schématisation des jeux de pouvoir entre les gens représentés par trois rôles : la victime, le persécuteur et le sauveur.
Le tableau ci-dessous, regroupe les différentes caractéristiques de ces 3 rôles :
Victime
Description :
• Soumis / rebelle
• Malchanceux, se plaint
• Appelle aux secours
Gain : obtenir de l’attention, se sentir important face à un persécuteur, se sentir aimé face à un sauveur
Motivations :
• Manque de confiance en soi
• Peur de s’affirmer
• Permet d’obtenir de l’attention, trouver quelqu’un pour faire à sa place
Persécuteur
Description :
• Agressif
• Au-dessus de la mêlée
• Celui qui fait des promesses
Gain : avoir raison
Motivations :
• Cacher sa vulnérabilité
• Partager ses frustrations
• Le pouvoir par la force
Sauveur
Description :
• Prescripteur
• Interventionniste
• Pas de vague
Gain : avoir de la reconnaissance (en sauvant)
Motivations :
• Empêcher les injustices
• Préserver l’harmonie
• Ne pas se sentir coupable de rien faire
• Avoir de la reconnaissance
2 – Repérer les différents rôles
J’ai créé cet exercice afin de m’exercer moi-même à reconnaître les différentes situations. Comment ça marche ?
- Commencez par lire une des phrases ci-dessous.
- Prenez le temps qu’il vous faut pour décrypter le(s) rôles en jeu. S’agit-il d’un rôle de victime, de sauveur, de persécuteur ?
- Pour vérifier : cliquez sur la phrase, la réponse apparaîtra dessous.
Bon exercice !
Après avoir réalisé cet exercice plusieurs fois, j’ai commencé à remarquer ces rôles en action dans mon entourage, au travail, dans la rue, au supermarché, en politique et aussi dans les films et dessins animés. Lorsqu’on observe ces rôles en action, on comprend qu’ils bougent et ne sont pas fixe ! Ce qui amène la troisième partie.
3 – La dynamique du triangle dramatique
En observant les situations, on remarque qu’une victime peut passer en persécuteur, puis en sauveur etc. Ce qui est redoutable, c’est que chaque changement de rôle, retournement de situation est vécu comme un drame (d’ou le nom du triangle dramatique).
Les rôles peuvent tourner très vite : d’une phrase à l’autre par exemple, ou bien mettre des années à tourner.
J’ai remarqué aussi que les rôles ne sont pas toujours joués par une personne : il peut y avoir des groupes par exemple (nous pouvons faire un rapide parallèle avec le mouvement Black Lives Matter, sans entrer dans les détails qui se positionne en victime) ou encore des institutions (l’état par exemple)
Il y a des répercussions négatives pour chacun des acteurs : l’énergie (le temps, la ressource mentale) utilisée dans ces jeux n’est plus utilisée à travailler, à accomplir des choses ou encore à s’élever.
4 – Pour aller plus loin : observez vos propres comportements et réactions
Remémorez-vous une situation qui a été désagréable pour vous avec une personne. Quelles étaient les revendications, répliques, arguments qui vous restent en tête ?
Prenez quelque chose de minime émotionnellement pour commencer.
Je vous invite à matérialiser les protagonistes et discours pour prendre de la distance, pour voir les relations d’un point de vue extérieur.
Personnellement, j’ai utilisé des petits bonshommes bâton dessinés sur du papier. Au dessus de mon bonhomme j’ai fait une bulle pour indiquer le rôle je jouais et disais jouer aux autres. j’ai entouré au dessus des autres les rôles antagonistes par rapport à ma vision. Puis j’ai ajouté les rôles vus et dit par l’autre personne.
Voici un exemple personnel, qui couché sur le papier m’est enfin devenu accessible.
• j’ai été persécuteur (face à une autre personne) : j’ai raison, ça doit être fait comme ça
• me faisais passer pour le sauveur d’un projet (le projet n’avance pas, c’est lui la victime)
• j’accusais cette autre personne d’être le bourreau de ce projet (c’est lui qui empêche le projet d’avancer)
Et les rôles ont ensuite tourné :
• j’ai été la victime de cette autre personne (persécuteur) que j’accusais de prendre mon énergie et mon temps pour gérer ces difficultés
• l’autre personne a endossé le rôle du sauveur en ne faisant pas de vague
Et puis cela a encore tourné… le jeu peut durer longtemps ainsi !
Le fait d’en prendre conscience me permet de relativiser et apaiser mes tensions. Maintenant, cela me fait souvent sourire dès lors que je remarque ces comportements typiques chez moi, ou chez les autres.
Ci-dessous, vous trouverez un modèle d’exercice pour prendre du recul sur une situation.
Tout d’abord, vous pouvez commencer par nommer les protagonistes en jeux en remplissant la case du “Qui”. Il y en a forcément 3 : cela peut être des personnes, mais il peut aussi s’agir d’organisations, de choses, d’un projet si cela concerne le travail…
Ensuite, chaque bonhomme a sa petite paire de lunette de couleur qui exprime son point de vue. Commencez par votre point de vue, c’est toujours plus facile : entourez le rôle que vous pensez jouez, et que celui vous attribuez aux autres protagonistes.
Accompagnez le rôle d’une phrase descriptive, pour que le contexte soit bien clair. Pour cela, vous pouvez vous aider de l’exercice précédent qui permet de repérer les différents rôles joués.
Ensuite, faite la même chose pour les deux autres protagonistes. La situation devrait vous paraitre plus claire, même si ce que vous découvrez n’est pas toujours agréable.
5 – Les 4 clés pour sortir du triangle ou ne pas y entrer
Tout d’abord, si je veux que les autres agissent autrement, il faut que je change d’abord mon comportement. C’est à dire qu’il faut que je prenne conscience de ma réaction automatique face à un comportement qui m’agace.
Si je choisi de réagir autrement à une action d’une personne, je lui propose un autre stimuli, qui lui permettra de faire une action différente.
Ok, c’est bien joli tout ça, mais dans la pratique, si je suis énervée, je n’ai pas du tout envie de dire merci ! Alors, comment je peux changer ma réaction ?
1ère clé pour sortir du triangle :
Prendre conscience du rôle que l’on joue ou que l’on s’apprête à jouer. Lorsque l’on s’observe, on prend de la distance. Il est alors plus facile de réfléchir. On sort du mode “automatique”.
2ème clé pour sortir du triangle :
Selon le rôle que l’on s’apprête à jouer, on peut ne pas répondre tout de suite et se poser ces questions :
→ Lorsque je sens que le rôle de victime m’appelle :
Ne pas dire oui ou non tout de suite. Reformuler d’abord la demande en réfléchissant en même temps si cela me convient ou pas. Si je ne sais pas ou ne comprends pas, demander ce que cela permettrait de faire en faisant ceci. Le pouvoir, c’est la marge de manoeuvre que l’on s’accorde à soi-même.
→ Lorsque je sens que le rôle de sauveur m’appelle :
Je vérifie que je puisse aider réellement, je propose mon aide et ne la donne pas si elle n’est pas demandée. Je ne propose pas d’aide sans contrepartie ou implicite afin de ne pas laisser l’autre avec une dette.
→ Lorsque je sens que le rôle de persécuteur m’appelle :
J’accepte que de négocier, de proposer, challenger plutôt qu’ordonner ou critiquer.
Voici quelques pistes pour changer sa réaction habituelle :
- Répondre en miroir exactement ce qu’a dit l’autre personne (même ton, même mimique)
- Faire comme l’autre personne en exagérant
- Répondre “Oui, tu as raison, je suis vraiment – mot qu’a utilisé l’autre personne, voire exagéré.
Ces trois pistes amènent souvent à l’humour, soit parce que l’autre personne se rend compte de son comportement, soit, soi-même on accepte la critique de l’autre et on prend alors du recul.
On peut aussi répondre de manière à ouvrir un échange pour comprendre le point de vue de l’autre :
- tu en penses quoi ?
- Et si on faisait cela qu’est-ce que cela permettrait ?
3ème clé pour sortir du triangle :
L’approche CNV (Communication Non Violente) qui part du principe qu’il y a un besoin non satisfait derrière ces mots.
Si une parole me met mal à l’aise, c’est que cela met en lumière un besoin non satisfait chez moi.
Les gens ne disent que deux choses : MERCI et S’IL TE PLAÎT.
Cet extrait m’a particulièrement frappé :
Pour aller plus loin : la playlist de 16 vidéos extraites du séminaire de Marshall Rosenberg >>> ICI SUR YOUTUBE <<<
4ème clé pour sortir du triangle :
Développée par Karpman, cette clé est de voir le triangle dramatique comme un triangle de compassion, avec les 3 rôles jouées en même temps par la même personne, à des ratios différents.
Le fait de voir les 3 facettes possibles d’une personne permet un grand détachement face à la situation et une meilleure compréhension de ce que peut vivre l’autre personne. Tout n’est jamais tout blanc ou tout noir.
6 – Mon mémo pour résoudre triangle de Karpman
1️⃣ 👀
Je remarque un rôle principal joué dans le triangle de Karpman
📝
Pour changer quelque chose,
il faut d’abord le voir.
2️⃣ 😭 😇 👺
Je trouve quels peuvent être les 2 autres rôles “non visibles”
📝
Je comprends les différents points de vues possibles, ce qui m’amène à comprendre la souffrance de la personne : “Je suis en souffrance, j’ai un besoin non satisfait”
3️⃣ 🤝
Est-ce que tu ressens _____ ?
Par-ce que tu as besoin de _____ ?
📝
Le sujet n’est plus de savoir qui a raison ou tord, mais de mettre en lumière les besoins afin de pouvoir les satisfaire.
On passe de la confrontation à la collaboration !
Bonne réflexion et analyse !
Estelle
Cet article est ma synthèse de plusieurs documents : le slideshare de SVI CONSULTING, l’article de Luc Taech, l’article de osezvotrepotentiel.com, la vidéo de Dominique Chalvin … eux-mêmes provenant de : L’analyse transactionnelle d’Éric Berne, et du psychologue Stephen Karpman (son livre traduit en français : le triangle dramatique, de la manipulation à la compassion Ed. Dunod mars 2020) > Empruntez-moi ce livre
Bonjour Estelle,
Je viens de lire ton analyse et réflexion sur le triangle de KARPMAN.
Une seule lecture n’est bien évidemment pas suffisante, et je pense devoir accepter aussi avoir des comportements identiques à ceux que j’identifie chez les autres comme une agression, une radicalité, un esprit non ouvert…..
Bref, cela a le mérite en tous cas de faire une introspection. Se poser ces questions, c’est déjà un pas vers l’identification de problèmes et l’envie de changer les choses.
Alors, merci pour toutes ces informations, ton petit schéma que je vais mémoriser (voire l’imprimer) et tenter de mettre en pratique.
Très beau travail Estelle, et le partager à qui voudra bien s’en intéresser, est génial.
Merci Caroline pour ton retour, c’est top si le schéma peut t’aider 🙂
j’avais déja rencontré ce triangle relationnel , dit de karpman . C’est difficile d’appréhender tout ce qui se passe tout qui s’y joue . Votre exposé , je l’ai trouvé clair . la démarche proposée pour en sortir claire . Je vous remercie . En fait je parviens petit à petit que c’était le mode de communication familial . Je commence ma sixième décennie et je suis heureux de comprendre , d’évoluer . Et j’espère enfin entrer positivement en communication avec l’autre de façon générale ou particuliére . A toutes et tous , belles découvertes …..
Bonjour Philippe,
Merci pour votre message. Je suis ravie d’avoir pu vous éclairer. Je vous souhaite de poursuivre votre découverte et de pratiquer, de tester.
Bonjour
Je viens de lire ton explication des différents rôles que nous pouvons jouer au quotidien J’adore les ex. d’apprentissage.
Et les exercices pour prendre conscience de nos comportement et comment essayer de les changer.
Pour faciliter la collaboration et non le conflit.
Merci beaucoup.
Merci Linda pour ton commentaire 🙂
Oui, comprendre Karpman et savoir ne plus y entrer permet d’accéder à un autre niveau de relation avec les autres.cela amène à la collaboration et aussi à la créativité.
Bonne découverte, et bonne pratique aussi pour maîtriser ce sujet,
Estelle
Super Article Estelle ! Très clair ! Synthétique et pratique !!! Belle capacité de synthèse ! Des clés indispensables pour déceler ces mécanismes qui créent tant de difficultés dans les relations ! Des références qui permettent d’enrichir nos outils! Merci pour ton travail que je vais partager pour que ça serve à d’autres !
Merci Hélène pour ton retour et ton commentaire 😉
Super si tu l’as trouvé clair, synthétique et pratique, ça me parle comme compliment et c’était l’effet voulu
Comme tu le soulignes, c’est un outil parmi d’autres pour pour faire évoluer nos relations aux autres.
Ho la la ! Mais que c’est bien synthétisé; le bonhomme OSBD et une partie de la CNV elle même … Merci pour votre travail remarquable de clarté et de simplification. Je vous citerais en référence dans mes cours.
Bonjour Cha, merci beaucoup pour votre commentaire. Je suis ravie que l’article vous aide à mieux comprendre.
Je n’avais pas en tête le “OSBD” (pour Observation, Sentiment, Besoin, Demande) quand j’ai écrit l’article, mais maintenant que vous le dites, en le relisant je le vois très clairement dans le mémo !
Je reconnais ma fille ,ds ce trio mais comment dois je faire pour repondre car elle adore commander,humilier,pleurer quand on va pas dans son sens
J’en peux plus de son comportement minable et elle na que 14ans sont plaisir la mechancete,la jalousie,commander,
Besoin d aide en urgence svp
Bonjour Sandrine,
Pour “répondre” lorsque l’on est dans le triangle de Karpman : il faut garder en tête que si l’on répond de manière “automatique”, c’est à dire avec la première chose qui nous vient à l’esprit ou ce que l’on a l’habitude de dire, alors en face la réaction sera la même et on restera dans le triangle de karpman. Il faut donc s’abstenir quelques micro secondes pour dire quelque chose que l’on aurai pas l’habitude. Je vous renvois pour cela à la partie 5 de l’article “5 – Les 4 clés pour sortir du triangle ou ne pas y entrer”. Voici quelques exemples de ce que vous pouvez faire pour obtenir une autre réaction de votre fille :
Bonjour Estelle
A vrai dire je suis un peu perdu même après lu plusieurs articles sur le triangle de Karpman
Ma psychologue m’indique que je suis passé de la victime au sauveur… Je ne sais quoi en penser
Bonjour Loïk,
Ce qu’indique votre psychologue correspond à la partie 3 de mon article “3 – La dynamique du triangle dramatique” : le drame, c’est lorsque les rôles changent. Pour sortir du rôle de sauveur, posez vous ces quelques questions lorsque vous vous apprêtez à aider :